Recension du n° 1 de la Revue de droit rural 2018

L’expropriation et le bail à ferme (congé pour exploitation personnelle, droits du tiers acquéreur évincé par l’exercice du droit de préemption, procédure et droits du conjoint d’un preneur), sont les matières traitées dans le numéro de la Revue de droit rural de ce premier trimestre de l’année 2018.

En son premier numéro de l’année 2018, la Revue belge de droit rural propose à ses lecteurs cinq décisions sur la matière du bail à ferme et du droit de préemption précédées d’un commentaire par Me Koen VAN DEN WYNGAERT, avocat à Turnhout, de l’arrêté du Gouvernement flamand du 27 octobre 2017 pris en exécution du décret flamand d’expropriation du 24 février 2017.

Expropriation en Région flamande

On rappellera brièvement, à propos du décret proprement dit, qu’il maintient les anciennes conditions d’expropriation mais  rend possible l’expropriation d’un droit réel spécifique (art. 4). Une fois délivré le permis d’expropriation, celle-ci se déroule en deux phases. Au cours de la phase administrative, l’autorité expropriante est tenue de négocier (art. 15 et 16) et de procéder à une enquête publique (art. 17 à 23). Le propriétaire du bien susceptible d’être exproprié peut introduire une demande tendant à l' »autoréalisation » de l’objectif d’utilité publique invoqué à l’appui de la demande d’expropriation (art. 24 à 27). Une enquête publique s’impose (art. 17 à 23). Une fois l’enquête achevée, la décision définitive d’expropriation est rendue et notifiée aux parties intéressées (art. 28 à 30). Un recours peut être exercé devant un « Conseil pour les Contestations des autorisations » (art. 43 et 44). S’ouvre alors la phase judiciaire. La matière est confiée au juge de paix, qui commence par vérifier la légalité de la décision d’expropriation puis s’attache à fixer l’indemnité d’expropriation provisionnelle puis le montant de l’indemnité définitive (art. 45 à 53). Son jugement sur l’indemnité définitive est susceptible d’appel devant le tribunal de première instance où la procédure se déroule comme il est dit aux articles 59 à 61 du Décret. Un droit de rétrocession est reconnu à la partie expropriée quand l’objectif de l’expropriation n’est pas entamé dans les cinq ans (art. 65 à 73), et lorsque l’expropriation de la partie d’un bien laisse le solde sans valeur significative, la partie expropriée peut exiger que l’expropriation s’y étende (art. 74 à 77).

L’examen par Me Koen VAN DEN WYNGAERT de l’arrêté d’exécution du décret en suit la structure. L’auteur conclut qu’après le législateur flamand, le gouvernement a globalement fait du bon travail, notamment en termes de clarification. Le commentateur se demande comment les instances expropriantes rempliront dans la pratique leur devoir de négociation et comment elles traiteront les demandes d’autoréaliation.

Congé pour exploitation personnelle – Bail concédé au preneur après abandon de l’exploitation par le bailleur

Le volet de la revue réservé à la jurisprudence s’ouvre sur la publication de l’arrêt de la Cour de cassation du 8 mai 2017 suivie de celui de la Cour constitutionnelle du 23 novembre 2017 qui ont été ici commentés (https://www.demeterius.be/perte-droit-de-donner-conge-exploitation-personnelle/ et https://www.demeterius.be/bail-a-ferme-combat-de-haute-cour/), à propos de l’article 9, alinéa 2 de la loi sur le bail à ferme. Les deux arrêts sont suivis d’une note de Jan OPSOMMER, avocat au barreau d’Audenarde.

Droit de préemption et droits du tiers acquéreur évincé

Le numéro propose ensuite une décision du Tribunal de première instance du Hainaut, division de Tournai, à propos des droits du tiers acquéreur lorsqu’il est évincé par l’exercice du droit de préemption. Pour la juridiction tournaisienne, le candidat à l’acquisition qui signe un compromis sous condition suspensive ne peut plus prétendre à l’acquisition si l’offre de préemption est acceptée par le preneur ou le cessionnaire de son droit. Le tribunal estime que le droit du tiers acquéreur se réduit en pareil cas à celui de demander des dommages-intérêts sur base du droit commun.

Procédure

Suit un jugement du tribunal civil d’Ypres du 18 octobre 2017 qui, en appel, confirme un jugement du juge de paix de Wervik. Ce jugement avait déclaré recevable et fondée une action en validation d’un congé pour exploitation personnelle que le bailleur avait introduite par voie de requête en omettant de joindre le certificat de domicile du preneur. Le tribunal rappelle que la réserve contenue dans l’article 1344bis ne doit pas s’interpréter comme excluant le bail à ferme de la procédure par requête prévue pour tous les baux, mais comme une allusion à la procédure de conciliation, obligatoire en bail à ferme. Quant au certificat de domicile manquant, le tribunal rappelle que son absence ne peut être cause de nullité que s’il en résulte un dommage pour la partie défenderesse.

La qualité de copreneur ne s’acquiert pas par le mariage

Le conjoint du preneur ne peut revendiquer la qualité de copreneur par le seul fait du mariage, d’autant qu’un bail à ferme est toujours réputé conclu en considération de l’identité et des qualités personnelles du candidat au bail. Le conjoint ne peut donc plaider le maintien d’un bail à son profit sous prétexte que le congé par lequel le preneur attitré a voulu mettre fin au bail n’a été donné qu’à sa seule initiative, avant la dissolution du mariage consécutive à un divorce. Telle est, en substance, la portée du jugement du Juge de paix d’Audenarde sur lequel se clôt ce premier numéro de la Revue belge de droit rural de l’année 2018