Superficies maximales de rentabilité, l’arrêté est illégal!

L’arrêté du Gouvernement wallon du 5 février 2009 fixant les superficies maximales de rentabilité est illégal ! (Cassation, 8 juin 2017)

La réforme de l’Etat semble rendre bien compliquée l’exécution de l’article 12.7 de la loi sur le bail à ferme, disposition redoutable pour le bailleur puisque le preneur confronté au risque d’une validation du congé donné pour motif d’exploitation personnelle peut trouver là une chance ultime de l’éviter, encore que toutes les conditions en soient réunies.

D’après l’article 12.7, « Quand le preneur exerce la profession agricole à titre principal le juge peut refuser de valider le congé lorsque celui-ci a pour conséquence de porter la superficie totale exploitée de l’entreprise agricole du futur exploitant au-delà de la superficie maximale fixée par le Roi. Il en est de même pour toute extension supplémentaire, lorsque l’entreprise du futur exploitant s’étend déjà sur une superficie supérieure à la superficie maximale. » Qui fixe ces « superficies maximales de rentabilité » ? Le Roi, précise l’article 12.7 en son troisième alinéa, et il le fait par un arrêté délibéré en Conseil des Ministres, sur proposition de la chambre provinciale d’agriculture compétente et sur avis conforme du Conseil national de l’agriculture. Les superficies doivent être revues au moins tous les cinq ans.

On était en 1988 lorsque cette disposition fut édictée, et depuis lors les efforts en vue d’une réforme de l’Etat se sont poursuivis, avec les approximations et difficultés que l’on sait. Un premier arrêté royal a été adopté le 29 octobre 1992, avec un retard de près de quatre ans. Il a été suivi par un arrêté royal du 5 février 1998, qui fixait les superficies maximales supposées s’appliquer jusqu’au 25 novembre 2002, puis plus aucun arrêté d’exécution n’a été pris jusqu’à l’arrêté du Gouvernement wallon du 5 février 2009, ce qui a contraint les juges à s’adonner à de périlleux exercices d’inventivité. D’après ce dernier arrêté, les superficies qu’il fixait pour la Région wallonne devaient s’appliquer rétroactivement à partir du 25 novembre 2007 pour faire lien avec l’arrêté précédent, et jusqu’au 25 novembre 2012. Plus aucun arrêté n’a été pris par la suite, ce qui tend à rejeter l’article 12.7 de la loi sur le bail à ferme au rang des leges imperfectae du droit romain, c’est-à-dire de ces lois qui, à défaut d’une sanction ou d’un arrêté d’exécution, ne sont pas concrètement applicables ou ne le sont que difficilement. Or voici que la Cour de cassation, par un arrêt du 8 juin 2017 (Revue de Droit Rural, 2017, n° 3, pp. 120-121), rappelle qu’il incombait à l’autorité fédérale, jusqu’au 1er juillet 2014, de prendre les dispositions requises par l’agriculture, la politique agricole commune et le bail à ferme, et par conséquent de fixer les superficies dites maximales de rentabilité, en exécution de l’article 12.7 de la loi sur le bail à ferme.

L’Etat et les Régions semblent avoir échappé jusqu’à présent à d’éventuelles actions en responsabilité… Souhaitons leur bonne chance.

EnregistrerEnregistrer